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La cuisson à l’électricité au secours de la déforestation dans le Parc National des Virunga

Stade d'avancement
Nov. 2022 à Oct. 2029
  • République Démocratique du Congo
  • Énergie
  • Nov. 2022 à Oct. 2029

Depuis 2022, un projet en République Démocratique du Congo explore l’usage de la cuisson électrique comme alternative au charbon de bois afin de de contribuer à freiner la déforestation massive en cours dans le plus ancien parc naturel africain situé à l’est du pays, Virunga. Une première phase d’évaluation du projet, financée par le FID, a révélé une adoption massive des ménages pour ce mode de cuisson dans la ville de Goma. Fort de ces résultats, Virunga Energies prévoit d’équiper 52 000 ménages de cuiseurs électriques d’ici 2029. Lors de cette seconde phase, cofinancée par l’Union Européenne et qui s'étendra jusqu'à octobre 2029, le financement du FID soutiendra leur distribution et permettra de mesurer si ce passage à l’échelle réduit la consommation de charbon de bois et limite sa production dans le parc, en partenariat avec des équipes de recherche de l’Université d’Anvers (Institute of Development Policy - IOB) et du Centre d'Economie de l'Environnement de Montpellier.

Projet déployé par :

Le contexte

À Goma, plus de 90% des ménages utilisent du charbon de bois pour cuisiner. Les plantations de bois ne sont pas assez grandes pour répondre à la demande exponentielle du combustible. Par conséquent, la majeure partie de la demande est satisfaite par du charbon illégalement produit par des groupes armés dans les forêts protégées du Parc National des Virunga inscrit au patrimoine mondiale de l’Unesco.

Comme le souligne Sébastien Desbureaux, chercheur au Centre d’Economie de l’Environnement – Montpellier (CEE-M), la recherche montre que l’impact environnemental (émission de CO2, déforestation) et social (sanitaire, bien-être humain) lié à la pollution générée par ce type d’énergie de cuisson, est importante, alors que des alternatives d’énergies plus propres existent et commencent à faire leurs preuves.

La cuisson à l’électricité au secours de la déforestation dans le parc national des Virunga

L’innovation

Le projet co-porté par Virunga Energies, la Fondation Virunga, le CEE-M, et l'IOB, part de l’hypothèse que le remplacement progressif du charbon de bois par l’utilisation d’un autocuiseur électrique peut contribuer à enrayer la déforestation, réduire les dépenses énergétiques des ménages, et participer à la paix dans la zone. Le projet consiste à mettre à disposition de familles un autocuiseur électrique, intégralement subventionné par l’entreprise sociale fournisseur d’énergie hydroélectrique, Virunga Energies, détenue à 100 % par la Fondation Virunga, en charge de la gestion du parc national avec l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature. L’augmentation des dépenses en électricité qui en résulte créerait à terme un retour sur investissement pour l’entreprise, tout en réduisant la demande en charbon de bois.

De 2022 à 2024, le projet a reçu un financement de stade « Evaluation d’impact » du FID qui a permis de de tester différentes modalités de soutien à l’adoption des autocuiseurs. Cette subvention a couvert l’achat du matériel, les dépenses d’électricité, les activités de sensibilisation environnementale, et a mesuré l’impact de ce nouveau mode de cuisson proposé sur l’utilisation et la demande de charbon de bois de la part des ménages.

En 2025, le FID, en partenariat avec l’Union européenne, un soutien historique du Parc des Virunga, soutiennent une deuxième phase du projet via sa subvention « passage à l’échelle », permettant à Virunga Énergie, fort des résultats de la première phase, d’accélérer l’adoption de la cuisson électrique à Goma en équipant 52 000 ménages d’ici 2029. Les cuiseurs électriques seront importés et vendus par l’entreprise Virunga à un prix subventionné de 20 $ avec une garantie de 3 ans,des ateliers de réparation sur place, et un lissage du prix pour les ménages aux revenus les plus modestes.

Deux nouveautés seront également testées : l’ajout de plaques à induction pour diversifier les usages et un programme « cook to earn » qui récompense les foyers utilisant l’électricité pour cuisiner grâce aux revenus issus des crédits carbone, permettant ainsi de réduire le prix de la facture.

Avec la collaboration du CEE-M et de l’université d’Anvers (IOB), l’équipe va évaluer l’impact de l’utilisation de la cuisson électrique à grande échelle, incluant l’introduction des deux nouveautés, sur les ménages et pour le parc des Virunga.

Une femme fait fonctionner le cuiseur électrique

Résultats attendus de la phase du projet en cours (2025-2029)

  • Mesurer l’adoption et l’usage des autocuiseurs électriques.
  • Analyser l’impact de l’adoption sur les dépenses énergétiques des ménages (consommation d’électricité et de charbon de bois)
  • Au sein des foyers, évaluer l’impact sur l’exposition aux particules fines ainsi que le temps dédié à la cuisine
  • Suivre les changements environnementaux, notamment la couverture forestière, grâce à l’imagerie satellite.
  • Tester certaines conditions favorables à la réplication, comme la stabilité de l’approvisionnement électrique et le coût abordable de l’électricité.

Si le modèle s’avère efficace au-delà de Goma et du Nord Kivu, il pourrait être reproduit dans d’autres contextes en RDC ou dans d’autres pays. En favorisant une augmentation de la consommation électrique des ménages en remplacement de la biomasse, ce modèle pourrait permettre d’intégrer des programmes plus larges d’accès à l’électricité.

Méthodologie et résultats atteints de la première phase du projet (2022-2025)

Résultats d'impact - La cuisson propre au secours du parc des Virunga

Les partenaires du projet ont conduit une évaluation d’impact auprès de 1600 foyers à Goma. Virunga Energies a offert à un échantillon correspondant à 2/3 des foyers des autocuiseurs électriques, distribués durant des sessions de prise en main, durant lesquelles les bénéficiaires ont reçu des conseils d’utilisation et ont testé collectivement les cuiseurs. Deux sous-groupes ont également bénéficié d’un bon d’achat couvrant un mois de dépenses d’électricité d’une part, et d’activités de sensibilisation aux enjeux environnementaux et sécuritaires dans la région d’autre part. Les résultats ont été obtenus par un suivi continu des dépenses d’électricité, la pesée des cendres du charbon de bois, des enquêtes ménage 6 et 12 mois après la distribution des autocuiseurs.

L'équipe de recherche avait affiché les résultats à mi-parcours de l’enquête en février 2024. Les résultats finaux sont désormais disponibles.

Autres résultats et apprentissages de la première phase

Les ménages visés par le projet ont durablement adopté la cuisson électrique. De plus, les dépenses d’énergie par ménage ont significativement diminué, de 5,76 dollars en moins par ménage par mois.

Les bénéfices sociaux et environnementaux de l’adoption des cuiseurs électriques sont aussi significatifs, à travers :

  • la baisse du temps passé à cuisiner pour les femmes, au bénéfice du temps de loisirs, des études et des activités économiques.
  • la baisse de consommation de CO2 (1,5 tonne par an par cuiseur).

L’évaluation d’impact confirme ainsi l'existence d'une demande réelle pour des modes de cuisson alternatifs, tout en mettant en évidence la nécessité d'un accompagnement à la fois financier et social pour garantir la pérennité des co-bénéfices sociaux et environnementaux.

A date, ni les effets directs de la cuisson à l’électricité sur la santé, ni ceux plus indirects sur l’amélioration de la sécurité dans la zone n’ont pu être mesurés ; ceux-ci pourront être pris en compte lors d’une phase ultérieure de passage à l’échelle du projet.

D’après les projections des équipes de recherche, le business model adopté dans le projet pourrait permettre une mise à l’échelle conséquente, caractérisée par une augmentation des abonnés au distributeur d’énergie hydro-électrique, Virunga Energies, de 20 à 25 000 actuellement à 50 à 60 000 à horizon 2029-2030.

Pour aller plus loin : Voir le QDD « Question de développement » dédié au sujet de la cuisson propre.

    L'équipe de recherche

    Sébastien Desbureaux est chercheur postdoctoral au CEE-M Il a dirigé le département Suivi & Evaluation de la Fondation Virunga en 2019-2021.

    Marijke Verpoorten est professeure associée d'économie à l'Université d'Anvers.

    Lara Collart est doctorante à l'Université d'Anvers depuis 2022, spécialiste des programmes d'évaluation.

    Nik Stoop est chercheur principal à l’Institut de politique du développement de l’Université d’Anvers.

    Christine Cikesa est doctorante à l’Université Catholique de Bukavu et l’Institut de politique du développement de l’Université d’Anvers.

    Centre d’Economie de l’Environnement – Montpellier (CEE-M)

    Centre d’Economie de l’Environnement – Montpellier (CEE-M)

    Le Centre d’Economie de l’Environnement – Montpellier est un institut de recherche travaillant sur l’économie de l’environnement et l’économie comportementale. Il est affilié au CNRS, à l’INRAE à l’Université de Montpellier et à l’lnstitut Agro.

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