Planification de la migration productive au Niger

Dans certaines régions très défavorisées, les niveaux élevés de pauvreté et d’instabilité compliquent la mise en œuvre de projets de développement et l’amélioration des moyens de subsistance des populations. Au Niger, 39% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté de 1,90$ par jour (Banque mondiale, 2021) et selon l’Organisation Internationale du Travail (OIT), moins de la moitié de la population âgée de 15 à 64 ans a un emploi (OIT, 2014). Au niveau régional, les décideurs politiques s’inquiètent des effets déstabilisateurs d’un chômage des jeunes élevé et en augmentation. Bien que la région favorise les flux transfrontaliers de personnes et de marchandises, des millions de personnes au Niger et dans toute l’Afrique de l’Ouest ne peuvent pas concrétiser les opportunités de migration productive qui pourraient leur être bénéfiques, ainsi qu’à leurs familles (Département des affaires économiques et sociales des Nations unies, 2019).

La migration régionale en Afrique de l’Ouest constitue une stratégie de développement prometteuse, mais elle n’a pas fait l’objet de recherches importantes ou de programmes spécifiques. Augmenter les opportunités régionales en soutenant la migration transfrontalière productive pourrait être une alternative aux programmes de subsistance en milieu rural, en particulier pour les personnes dont les aspirations conduiraient à un voyage migratoire risqué, avec un faible niveau d’information sur les risques encourus et les conditions de vie une fois arrivé à destination.

L’Université de Pennsylvanie, en collaboration avec Mercy Corps Niger et l’Immigration Policy Lab de l’Université de Stanford, a conçu et commencé à mettre en œuvre le programme Planification de la migration productive. Ce programme aide les jeunes hommes nigériens à planifier et à réaliser des migrations transfrontalières réussies. Il est conçu pour apporter un soutien à la recherche d’emploi et faciliter un projet migratoire sûr et productif comme stratégie de subsistance au sein de la Communauté Economique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

L’objectif principal du projet est de réaliser une évaluation rigoureuse du rapport coût-efficacité de la migration régionale comme possible alternative à d’autres programmes de subsistance en milieu rural, d’évaluer s’il existe de potentielles retombées économiques non réalisées de la migration Sud-Sud et quels pourraient être les effets du soutien à la migration saisonnière sur les moyens de subsistance et le bien-être des populations. Les financements du FID permettront de tester le programme Planification de la migration productive. Si le pilote du programme est réussi, il sera évalué avec un essai contrôlé randomisé.

Le programme Planification de la migration productive comprend plusieurs composants : des informations sur les documents nécessaires pour voyager et travailler, les destinations potentielles, une formation au savoir-être et aux applications mobiles de gestion monétaire, l’animation d’une session du programme pour le migrant et sa famille afin de s’assurer que les migrations sont préparées de façon collaborative, et une subvention conditionnelle de mobilité pour éliminer les obstacles financiers à la migration. ** L’essai contrôlé randomisé sera mené auprès de 2 600 participants des villages de la région de Tahoua, qui seront répartis de manière aléatoire en trois groupes** :

• un groupe qui recevra le programme Planification de la migration productive ;
• un groupe qui recevra un transfert monétaire inconditionnel (estimé à 100 dollars USD)
• un groupe de contrôle.

L’intervention d’une durée de 18 mois et l’évaluation permettront de répondre à plusieurs questions d’intérêt académique et pour les politiques publiques : les revenus additionnels dissuadent-ils ou encouragent-ils plutôt la migration ; quelles sont les retombées économiques d’une migration régionale facilitée ; et le programme génère-t-il des bénéfices qui opèrent par des canaux autres que le seul effet revenu.

Le projet repose sur l’hypothèse que la mise en œuvre du programme Planification de la migration productive conduira à une migration productive légale, mieux informée et plus fréquente, avec des effets positifs sur le bien-être économique et psychosocial des ménages.

Les résultats du pilote et de l’essai contrôlé randomisé éclaireront les futures approches de développement dans des contextes d’instabilité et de pauvreté massive. En cas de succès, l’intervention permettra de générer des preuves d’impact du programme et donc de diversifier les moyens de subsistance, d’élargir les opportunités des migrants sur le marché du travail et d’accroitre les flux de transferts de fonds pour leurs familles au Niger.

La Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest offre un environnement favorable à la migration régionale, notamment par la libre circulation qu’elle permet. Dès lors, le programme de Planification de la Migration Productive pourrait être étendu dans des communautés ayant des caractéristiques similaires et où il existe des obstacles à la migration.